Le séjour à la Maternité, bien que très court dans la
plupart des cas, laisse une empreinte dans la mémoire des jeunes parents. C’est
un moment particulier, hors du temps où les émotions s’enchaînent et se
mélangent à la réalité. Dans ce cocon, certains se sentent comme des poissons
dans l’eau tandis que d’autres s’y retrouvent oppressés. Il y a une vie propre
à ces quelques jours, une ambiance qui ne se retrouve pas ensuite alors que
parents et bébé prennent le chemin de leur nouvelle vie en passant les portes
sans retour de la maternité quelques jours après avoir accueilli un bébé tout
neuf.
Pendant ces quelques jours, je me suis sentie tour à tour
actrice et spectatrice : un rôle universel, celui de maman, et un rôle
propre, le mien.
De cette période, j’ai eu envie de me souvenir : des
temps forts bien sûr mais aussi d’anecdotes tendres, rigolotes ou porteuses de
sens.
Cela constituera évidemment un recueil de souvenirs que je
pourrai partager avec notre petite L. dans quelques années, mais également
peut-être un carnet de bord qui rappellera à d’autres ce moment si spécifique
qu’est le séjour à la maternité.
1-L’accouchement
C’est un peu par là que tout commence. Pendant des mois les
parents se préparent, la future mère a fantasmé ce moment entre impatience et
appréhension.
Chacun de mes accouchements a été différent mais j’ai
toujours eu une petite angoisse à mesure que le terme approchait.
Cette fois-ci j’ai fait très fort puisque nous sommes
arrivés à 8h10 à la maternité et tu es née à 8h55. Dilatée à 9, j’aurais
accouché dans le hall d’entrée si on n’était pas venu me chercher pour nous
conduire dans la salle d’accouchement. Vous l’aurez compris, je ne comptais pas
trop sur la péridurale cette fois encore mais j’avoue que cet accouchement a
été un peu rapide. J’étais très fatiguée et toi aussi. Tu as été mise dans une
couveuse et je me suis retrouvée seule en salle de repos pendant 30 minutes.
J’avais besoin de reprendre des forces mais j’aurai aimé profiter de mon bébé
en peau à peau. Heureusement, tu m’as rejoint pour ne plus me quitter.
Mon expérience a été très intense, c’était aussi mon choix
que de faire tout le travail à la maison avec ceux que j’aime. Mais il faut y
être préparé car cela demande beaucoup d’énergie.
Accouchement avec ou sans péridurale, accouchement spontané
ou déclenché, c’est le point de départ d’une nouvelle vie qui commence à la
maternité. L’accouchement participe à la création du lien d’attachement. C’est
un souvenir douloureux et merveilleux.
2- Le premier échange avec bébé
Comment oublier ce premier échange avec bébé ? Pour
nous le premier regard se combine avec la découverte du sexe de notre enfant.
Pendant des mois, on a imaginé tour à tour un garçon ou une fille et puis
arrive enfin notre bébé.
C’est une fille, notre deuxième petite fille. Elle est
sortie toute propre, très douce. Elle est fine et longue, déjà pleine
d’élégance. Je l’ai sentie sur ma peau avant qu’ils ne l’enlèvent. Son papa l’a
accompagnée, l’a regardée, habillée, choyée. C’est à ses côtés que tu as passé
tes premiers instants.
C’est notre premier échange, notre première fois. La salle
d’accouchement n’existe plus, il n’y a plus que nous 3 ensemble, c’est tout.
3- La première journée
L’avantage de ne pas avoir de péridurale est de récupérer
très vite. Cette première journée se passe dans un demi flou : entre le
sentiment que tu es bien là et la découverte de ton existence, toi qui la
veille était encore dans mon ventre. J’entends ton souffle dans ton petit
berceau, je te vois si petite et si mignonne, déjà si pleine de vie quand il
s’agit de têter. Papa est reparti se reposer et préparer ton frère et ta sœur.
Le bal des aides-soignantes et personnel de l’hôpital vient
à peine perturber notre rencontre. Je suis en forme mais tu es bien plus
présentable que moi. Tu portes le pyjama comme un gant tandis que je peine à
enlever la chemise d’hospitalisation et à la troquer pour un pyjama tout neuf.
Mon corps est encore marqué par l’accouchement, j’ai les traits tirés, les
douleurs de la grossesse sont encore significatives.
Je n’ai pas envie de voir grand monde, je préfère rester
confinée dans cette chambre avec toi.
La première journée, nous sommes examinées, interrogées sans
cesse, un peu bousculées. Le silence règne car tu ne fais pas trop encore
entendre ta voix.
La première journée change quand les visites commencent à
16h. C’est le cœur battant que ton frère et ta sœur poussent la porte de la
chambre pour découvrir leur petite sœur…
Les journées suivantes sont rythmées par les soins, le
premier bain, les visites, les tétés. C’est une petite routine qui se
prolongera hors les murs.
4- La rencontre avec ton frère et ta sœur
C’est certainement le plus joli moment de cette troisième
grossesse. Ils t’ont déjà célébré quand tu étais dans mon ventre, ils vont
maintenant t’adorer. C’est un tout petit bébé qu’ils découvrent. Ils n’auraient
pas imaginé que cela ressemble à ça, si fragile, déjà tellement humain et
pourtant tellement miniature… Te prendre dans leurs bras, te sentir, te faire
des bisous, ils sont ivres de toi.
Alors que ta sœur joue déjà les petites mamans, ton frère
est impressionné. Il mettra une semaine à redescendre de la naissance de sa
petite sœur. Il a vu sa maman partir pliée en deux pour la maternité, il a pris
son rôle de grand frère très au sérieux. Il a grandi un peu plus avec toi. Ce
trop-plein d’émotion ressort sous la forme d’une énorme fatigue.
Mais une chose les frustre tous les 2 : nous voir
rester à la maternité.
Ils ne le savent pas encore mais ils seront les meilleurs
frère et sœur que l’on peut souhaiter une fois rentrés à la maison.
Avoir beaucoup d’écart c’est avoir la chance de vivre une
expérience fraternelle unique.
5- La nuit
Les nuits sont souvent plus agitées que les journées dans
les maternités. Cette troisième fois n’a pas dérogé à la règle.
La première nuit, alors que tu es relativement tranquille,
le personnel soignant passe régulièrement nous voir. Puis ce sont les bruits
dans les couloirs : les mamans insomniaques, les bébés qui pleurent, le
personnel d’entretien qui s’agite, claque les portes… La nuit aussi la
maternité vit dans son microcosme.
La deuxième nuit, c’est toi qui va me solliciter. Je
comprendrai le lendemain avec la sage-femme que tu avais juste faim, le
colostrum ne te suffisant déjà plus… Tu vas ainsi pleurer bien plus qu’avant,
me rappelant que les premiers mois avec un bébé sont souvent faits de nuits
écourtées et de larmes inexpliquées.
La troisième nuit, nous sommes prêtes, habituées aux bruits
extérieurs, repues, nous savons que demain nous pourrons sortir.
6- Sages-femmes et personnel soignant
Lors de ce séjour j’ai pu observer le ballet des personnels
de la maternité. Il n’y a pas une mais plusieurs sages-femmes : celle qui
va t’aider à accoucher n’aura pas la même attitude que celle qui gère les soins
post-accouchement. J’ai pris conscience de la complexité de leur métier :
tour à tour général en chef quand il faut aider la maman à puiser dans ses
forces pour accoucher, experte quand il faut accueillir bébé tout neuf, amie
bienveillante quand une maman a besoin de se confier, soignante, créatrice de
liens, enseignante… La sage-femme détient de multiples savoirs et savoir-faire.
Puéricultrices, infirmières… tous ont un rôle bien défini à
la maternité mais elles oeuvrent pour le bien-être de la maman et du bébé.
7- Les autres parents
Alors même que nous avons tous vécu la même aventure de vie,
les conventions sociales reprennent vite le dessus à la maternité. On
s’observe, on se scrute, on se dissèque.
Il y a les primipares pour qui tout est découverte. Certains
assument le fait qu’ils sont dépassés ; d’autres veulent déjà tout
contrôler.
Il y a les « déjà » parents qui comparent tout à
leur grossesse ou à leur bébé précédent. Certains pensent avoir tout oublier,
pour d’autres les gestes reviennent machinalement.
Il y a les mamans qui semblent déjà avoir retrouvé leur
silhouette et leurs habits d’avant-grossesse ; d’autres qui portent coute
que coute leur petite jupette en taille 36 même si la fermeture éclair est
grande ouverte. Beaucoup sont un peu désorientées et ont des tenues
improbables. De toutes façons, toutes les mamans comprennent qu’il faudra du
temps avant qu’elles ne défilent pour Victoria Secret. Pour les jeunes mamans,
c’est souvent un choc que de découvrir que leur corps n’est plus comme avant
alors même que leur bébé est dehors.
Il y a les questions naïves, les inquiétudes face au poids
de bébé, le désespoir quand l’allaitement tant rêvé ne se passe pas comme
prévu, la fatigue.
Il y a parfois des petits sourires attendris entre mamans.
Il y a des parents qui partagent tous ce moment suspendu de
l’arrivée de bébé et qui savent que ce séjour est un avant-goût avant le grand
bain du retour à la maison.
8- Ton papa
Si l’accouchement est éprouvant pour la maman, il l’est
aussi pour le papa. Ton papa est très sensible et vit chaque accouchement comme
un moment intense. Il a été ému, il a été stressé, il a été heureux, il a été
anxieux, il a été triste, il a été euphorique. Pendant trois jours ce fut pour
lui aussi le Yoyo des émotions. C’est un peu comme s’il avait été shooté aux
hormones : ocytocine, endorphine, cortisol ont circulé dans son corps.
Le séjour à la maternité est un moment compliqué pour le
père car il est aussi synonyme de solitude. Et quand on a déjà d’autres enfants
à gérer, il faut aussi assurer à la maison !
Mais ton papa était là à la sortie, fier comme Artaban, de
ramener sa petite fille à la maison.
9- Ta maman
Ta maman c’est moi. Clairement imparfaite, assez maladroite
quand il s’agit de se rappeler des soins du cordon mais très zen pour m’occuper
de toi. Fière de t’avoir mise au monde, admirative devant chacun de tes gestes,
curieuse de mieux te connaître, fatiguée quand il faut rester éveillée une
partie de la nuit, débutante face au mystère que tu es.
Ton papa, ta maman, ton frère, ta sœur déjà si aimants dès
le séjour à la maternité.
10- Vive la sortie
Après trois jours dans cette atmosphère particulière de la
Maternité, c’est un grand soulagement mêlé à une certaine appréhension que de
passer les portes pour rentrer chez soi.
Nous avons fait le tour des sages-femmes pour leur dire au
revoir, on a rassemblé les affaires et jeté un dernier coup d’œil à cette
chambre qui a vu nos premiers pas. On t’a enfilé maladroitement ton pilote, qui
comme tous les pilotes taille 1 mois, est trois fois trop grand. Ca nous amuse
de te voir ainsi en petit ourson. Il a fallu réapprendre à installer ton siège
auto dans la voiture…
Comme tous les parents, nous quittons la maternité, forts de
cette rencontre avec toi et faibles devant ce grand mystère qui nous attend.
Le séjour à la Maternité est fugace et dans quelques mois on
se rappellera l’essentiel. On aura oublié les visages des gens croisés, la
couleur des murs de la chambre, le goût insipide des repas…
Mais chacun de nous
se rappellera ces premiers instants de vie avec toi, passerelle avant notre vie
à 5.
Wahou!
RépondreSupprimerQue de souvenirs! C'est joliment décrit et ça résume bien cette ambiance si particulière et ces émotions de dingue!
C'est vrai que j'ai du mal à me souvenir de la couleur des murs ou des repas... mais le ressenti et les instants de vie entre ces murs sont inoubliables!
Bises
Marion
Pfiou comme tu as bien décrit les émotions de ces premiers jours...
RépondreSupprimer❤️
Merci Virginie pour ce beaux récit, j'j'en ai eu les larmes aux yeux. Tellement envie de connaître cette vie à 5 maintenant que David et Flavio sont grands. Encore tous pleins de bonheur à vous 5.
RépondreSupprimerMieux qu'un film, on attend la suite...
RépondreSupprimerPapito
Magnifique article, qui m'a replongé dans mes propres souvenirs d'accouchement et de maternité. Profitez bien tous ensemble de votre nouveau petit bonheur ! ♥
RépondreSupprimerTon article est tellement beau, tu a su tout expliquer.
RépondreSupprimerIci, ça sera pour juillet ;-)